lundi 8 juin 2015

Une photo, quelques mots (14)


Ce lundi, je rejoins le rendez- vous de Leiloona du blog Bric à Book. Pour rappel, il s'agit d'écrire un texte à partir d'une image.
Cette semaine, c'est Leiloona qui nous propose une de ses photos du pont des arts à Paris.


Lucile sentit le vent frais dans ses cheveux. Paris était beau même la nuit, elle en convenait, mais elle était tellement remplie de rage qu'elle ne voyait pas la beauté de la Seine ni même celle des bâtiments. Elle s'approcha de la rambarde d'un pas décidé et rabattit la capuche sur sa tête. Elle savait où le trouvait et elle savait qu'elle le reconnaîtrait entre mille. Elle se pencha et se mit à fouiller dans l'amas de cadenas. Elle chercha, fébrile, pendant plusieurs minutes. Des larmes de rage lui brouillaient la vue. Au moment, où elle pensait ne pas le trouver, son regard se posa dessus. Elle le saisit vivement. Le contact du métal froid la rappela à une réalité lointaine.
Elle se souvint du jour où, tous les deux sur ce pont, ils s'étaient jurés de s'aimer pour toujours. Elle revit le regard qu'il lui avait lancé, elle sentit à nouveau son parfum, la chaleur de ses bras. 
Elle s'essuya les yeux du revers de la manche. ne pas flancher... Mais ce maudit bout de métal semblait vouloir l'envoûter.
Elle se souvint, du cadenas qu'il avait sorti de sa poche, lui expliquant ce que cela allait symboliser. La joie qu'elle avait ressenti à ce moment là, elle la ressentirai à nouveau pour leur mariage. Il s'était penché sur le pont et avait accroché le cadenas sur lequel il avait pris soin de graver leurs initiales. puis il avait jeté les clés dans la Seine. Elle avait aimé ce geste...
Elle saisit le cadenas plus fermement et commença à s'acharner dessus avec des tenailles.
Elle se souvint de l'autre parfum sur sa chemise, des factures pour un bouquet dont elle n'avait jamais reçu les fleurs, de l'étrange regard de son mari, de ces disputes, puis du jour où arrivant "trop tôt" elle avait découvert sa sœur le chevauchant.
Le cadenas était bien trop fragile et il céda facilement sous les puissantes tenailles. Cela lui fit tout drôle de se retrouver avec ce tout petit bout de métal froid dans la main. Ce tout petit bout d'eux qui était du passé. Elle respira profondément, embrassa le petit cadenas et le jeta dans le fleuve. Elle observa longuement son mariage coulait. 
Sa nouvelle vie commençait aujourd'hui.

N'hésitez pas à aller lire les autres textes sur le blog de Leiloona.

10 commentaires:

monesille a dit…

Ce sont les poissons qui ont été surpris de recevoir un cadenas sur la tête, depuis le temps qu'ils cherchaient à quoi pouvaient bien leur servir toutes ces clefs :)

Parlonslittérature a dit…

Oh lala quelle histoire ! Je m'y attendais pas ! Bravo

Unknown a dit…

La fin est très belle! J'aime bien l'idée de cette rage passée sur le cadenas, devenu exutoire de sa douleur.

Anonyme a dit…

Quel beau texte!

Adrienne a dit…

je ne l'aurais pas embrassé et je l'aurais plutôt jeté dans un parc à conteneurs (LOL) mais pour le reste je crie bravo :-)

Amandine a dit…

Merci pour vos visites et vos gentils commentaires.

sarah a dit…

Ah oui, en effet, nos points de départ sont identiques.
Pas de rage chez moi, mais ça m'a traversé l'esprit!
J'ai une préférence pour la fin.

Stephie a dit…

Très chouette texte et jolie chute :)

Ludo a dit…

Et apres elle se fait aussi sa sœur a la tenaille? Joli idée que celle du cadenas comme exutoire de la colère!

Unknown a dit…

La rage d'une femme trahie très bien décrite ! bravo